La question à vous poser lorsque les tensions apparaissent dans votre équipe.
«Ça commence à avoir une influence négative sur toute l’équipe et sur les résultats !». L’histoire est classique et elle finit souvent au département RH. Paul et Jeanne ne se parlent plus et lorsqu’ils le font, la tension est à couper au couteau. Ils doivent pourtant collaborer sur ce projet devenu central. Alors la nervosité, voire le sentiment d’impuissance grandissent du côté du management. Les RH suggèrent ensuite souvent la médiation et la suite est incertaine. Ça vous rappelle quelque chose ?
Audits et autres analyses de climat sont révélateurs d’un point que les dirigeants tendent à oublier. Les conclusions mettent quasi systématiquement en exergue que les conflits ne sont pas uniquement une affaire d’individus. Si le facteur humain joue évidement un rôle, les facteurs structurels agissent de manière plus importante encore. Comment ne pas finir sous tension lorsque les délais sont irréalistes, faute de ressources ? Que les instances décisionnelles ne sont pas en place ou ne tranchent pas ? Que la stratégie est interprétable et donc floue ?
Une part du conflit revient au management
Chers managers, voyez, ces tensions sont aussi les vôtres ! Sur le terrain, il est frappant de voir à quel point la transformation est encore peu soutenue par des structures efficaces. Les projets « s’empilent » sans gestion de portefeuille, ni attention fine aux ressources et aux charges concernées. Les changements de priorités ne sont pas accompagnés sur le terrain. Et les bons vieux silos fonctionnels rendent le travail transversal toujours aussi aléatoire. Dans ce contexte, les conflits interpersonnels deviennent alors souvent le révélateur de ces manques.
Réjouissez-vous cependant. Malgré l’absence de ces structures, vos projets avancent tout de même ! C’est que vos équipes sont responsables, voire carrément engagées. Elles tentent de compenser les lacunes organisationnelles, mais perdent énergie et enthousiasme en chemin. Elles s’épuisent, ce qui met à mal les relations ! Certes, une médiation remettra de l’huile dans les rouages, mais elle ne corrigera pas le problème de fond. Au mieux, elle permettra de continuer à compenser les lacunes. Au pire, l’immobilisme organisationnel dépitera les personnes concernées.
La question clé à se poser est donc la suivante: quelle est la part organisationnelle dans le conflit qui naît au sein de mes équipes ? Cette part vous revient en tant que responsable. Le manager de demain facilite et met en place les conditions propices à la réussite des équipes. Il responsabilise, certes, mais il n’en n’est pas moins responsable.
Quatre pistes pour corriger le tir
Face à cette réalité, quatre réflexions complémentaires à la fameuse médiation, devraient être menées:
Premièrement, la vision et la clarté de la stratégie sont fondamentales pour la construction d’une compréhension commune de la réalité. À votre échelle, veillez à lever les incohérences, combler les lacunes, etc.
Deuxièmement, veillez à la clarté des priorités. Bien souvent, une structure de type Project Management Office offrira clarté et réalisme aux initiative lancées. Un portefeuille de projets bien ficelé sera central, d’autant plus face à des changements de priorités fréquents.
Troisièmement, dans le changement et particulièrement en mode projets, il est souvent difficile d’être au clair sur qui fait quoi. Clarifier les rôles et responsabilités de chacun, projet par projet sera clé. Les matrices RACI seront par exemple une aide précieuse pour que vos équipes puissent davantage s’orienter.
Enfin, bien sûr, les compétences de gestion de projets de vos équipes seront critiques. Comme leur capacité à communiquer efficacement pour intégrer points de vue et opinions différentes.
Plus généralement, ces 4 pistes mettent en évidence le besoin de travail conjoint entre la ligne et les RH. En définitive, transformer n’est pas qu’une question de produits, services et autres systèmes. Ce devrait être aussi le développement de nouvelles structures organisationnelles. En l’occurrence, une magnifique opportunité pour les RH aussi de jouer un rôle plus stratégique.
Alors au prochain conflit, posez-vous deux questions : quelle est la part du structurel dans l’émergence de tensions et comment vais-je contribuer à la réduire ?
Anne Grandjean est directrice générale adjointe et consultante senior chez Vicario Consulting.